Les pièces de Shakespeare ont offert à Freud et à Lacan le matériau à partir duquel ils ont pu évaluer la résurgence des désirs refoulés dans la vie psychique. Mais elles ont également étendu leur influence sur l'inconscient d'auteurs caribéens tels que Derek Walcott et Caryl Phillips, dont les œuvres mettent en scène l'ombre d'une présence fantomatique imposante rappelant le père d'Hamlet ou celle de l'Ariel soumise. Le Bolom de Walcott dans Ti-Jean et ses frères, ou l'apparition de la femme blanche dans Dream on Monkey Mountain, par exemple, présentent de nombreuses similitudes fonctionnelles avec les esclaves et les esprits asservis par le Prospero dans la Tempête de Shakespeare. Et si nous poursuivons cette dynamique comparative, avec le cas de Strange Fruit de Phillips, l'homologie entre l'absence révélatrice du fantôme de Wallace Marshall et celle du père d'Hamlet devient manifeste. Que ces figures énigmatiques jouent le rôle d'exacerbateur de désirs refoulés ne fait aucun doute. Ils répondent à la moindre incursion psychanalytique là où ils peuvent le mieux exprimer leur potentiel révolutionnaire qui pourrait être résumé dans le dilemme suivant : « Battre ou ne pas battre le phallus : telle est la question ». Cet article vise à montrer que la solution à cette énigme peut être atteinte en répétant l'Œdipe postcolonial avec un accent particulier sur le nexus caribéen. des Caraïbes.